Réception des nouveautés : les offices
Les nouveautés nous parviennent sous forme d’offices plusieurs fois par semaine, les plus gros éditeurs nous font parvenir deux voire trois offices par semaine ; ils sont choisis par les éditeurs pour et par chaque libraire selon un choix assez arbitraire d’après un classement « bateau » organisé par chaque éditeur.
La réception des offices procure des plaisirs ou désagréments selon le comportement de chaque éditeur : soit ils nous submergent de livres que la librairie ne peut présenter correctement et qui vont attendre leur retour planqués sous les tables ou dans le bas des bibliothèques, soit ils nous respectent et alors ce n’est que plaisir.
Les libraires financent les éditeurs
Car de toutes façons nous devrons les payer à 60 ou 90 jours. Ainsi les libraires financent la trésorerie des éditeurs car nous n’avons pas le droit de retourner les nouveautés invendus avant trois mois, et le temps de notre tri, remballage, renvoi, réception chez eux, nous recevons le remboursement qu’au moins huit mois plus tard.
Qui paye les découverts ? qui vont quémander aux banquiers ce découvert ? Aucun libraire ne fait ce métier pour bien gagner sa vie, mais de temps à autre c’est assez rude et angoissant côté trésorerie et découvert bancaire.
Ainsi l’ouverture des colis d’office peut être source de plaisir
- mais pourquoi ils m’envoient cela je n’en veux pas, je n’ai jamais demandé ce genre de livres, aucun client n’en sera intéressé et ils ne vont qu’encombrer ma librairie, comme si j’avais trop de place déjà pour présenter les livres intéressants !
Cependant dans la grande majorité des cas recevoir et déballer les offices est la source d’un des plus grand plaisirs d’un libraire.
L’ouverture d’un colis de livres est d’abord sensuel.
Chaque colis a son propre poids, chacun avec des dimensions différentes. À l’ouverture nous arrive en premier l’odeur des livres fait de celui de la colle et de l’encre, odeur qui nous envahit, puis viennent les couleurs des couvertures, le poids de chaque livre, sa plus ou moins grande souplesse au feuilletage, l’aspérité ou le soyeux du papier, la dimension de chaque livre qui peut être mince, épais, plus long que large ou l’inverse.
Faire connaissance avec avec chaque livre
Seulement alors nous commençons à faire connaissance avec chacun. Un auteur connu ou nouveau ? cet auteur nous l’apprécions ou pas ? son nouvel écrit dont nous prenons connaissance avec certes le titre, mais surtout le dos du livre que nous lisons ou parcourons plus ou moins rapidement.
Étant donné qu’il est hors de question qu’un libraire lise ou ait lu tous les livres qu’il vend nous devons trouver un moyen rapide de nous faire une opinion pour le rendre « appétissant » au client. La plupart de ces livres ne nous ont pas été présentés par le représentant, qui ne vient qu’une fois par mois environ, selon l’éditeur, et qui ne nous parle que des livres importants pour lui.
Quand nous connaissons notre clientèle nous savons à qui nous allons le proposer, le vanter, en parler. Je dis bien « appétissant » car chaque fois que j’ai acheté des livres dans une librairie j’avais la sensation d’avoir à manger, à me nourrir, à combler d’abord mon ventre ! La culture nourrit aussi le corps.
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