Les mots pour le dire : inceste maternel

Les mots pour le dire : inceste maternel

Ce devait être en hiver 1999 : Ma radio toujours allumée en bruit de fond sur France-Inter, tout à coup mes oreilles entendirent :

…inceste maternel…

Mon ouï, jusqu’à cette seconde, sourde à ce qui se passait sur France-Inter, s’était comme réveillée brutalement. Tout à coup ce qui se nichait au plus profond de ma conscience saisit ce qui se dit. Ils auraient parlé d’un tremblement de terre quelque part sur la planète ou d’une nouvelle guerre je ne l’aurais pas entendu. Il faut croire que je vivais depuis toujours avec ce traumatisme présent à mon insu dans ma conscience.

Je n’entendis que « inceste maternel » et rien de ce qu’ils en commentaient. C’était la première fois de ma vie que j’entendais le mot « inceste » accolé à « maternel ».

Jusqu’à ce jour j’avais entendu des commentaires de psy et des témoignages sur les deux autres incestes : le paternel et le fraternel, mot qu’il ne fallait bien évidemment pas prendre dans le sens « amical » mais tout au contraire agressif quand il était accolé à « inceste ». Ce sens agressif paraissait, tout à coup, identique en ce qui concerne « maternel ».

En une seconde je compris que ce que j’avais vécu de 13 à 18 ans de la part de ma mère était un inceste.

Jusqu’à ce jour je n’avais pas eu de mot pour désigner ce que ma mère m’avait fait subir.

Analyse de 1984 à 1991

J’avais fait une analyse psy de fin 1984 à mai 1991.

Je n’avais d’ailleurs pas pu entreprendre quelqu’analyse que ce soit tant que ma mère était vivante.

Par chance elle était morte en janvier 1984, j’avais été libéré et pu, enfin, entreprendre une analyse. J’avais eu longtemps le prétexte, réel, que je n’avais pas de revenu suffisant pour entreprendre un tel travail sur moi.

Malgré tout je ne pus que remarquer que je n’avais pas vraiment changé de statut financier quand j’entrepris ce travail d’analyse, c’était donc bien la mort de ma mère qui m’avait permise de l’entreprendre, et qu’elle fut en vie qui me l’avait empêchée.

J’y avais décris ce que j’avais subi de la part de ma mère sans jamais le nommer. La première psy (une femme), puis le deuxième psy (un homme), n’étaient pas intervenu pour me donner ce mot. Ils écoutaient, assis bien tranquillement là dans un fauteuil derrière ma tête, moi allongée sur le divan.

Je criais je pleurais

Certes en parler pour la première fois, crier, pleurer, souffrir l’horreur, la vider, m’avait fait du bien, mais je restai toujours dans l’inconnu, c’était resté « l’innommable ».

Ce mot ayant là un double sens : ce qu’on ne peut nommer par manque de vocabulaire, et ce qu’on ne peut nommer parce qu’indicible. Les deux s’appliquant à mon « cas ».

Je vendis ma maison pour un bon prix. Je pus changer de voiture et de commune. Je pus louer un appartement, dans une région où les protestants avaient un passé historique marqué.

La femme du pasteur ne comprend pas

Puis dans la nouvelle commune je fis du soutien scolaire et connus un autre pasteur et sa femme. Là ma situation financière s’étant un peu stabilisée je pus repenser à ce que j’avais appris par France-Inter, et j’en parlais à la femme du pasteur. Je le répétais plusieurs fois. Elle resta muette. Je ne sus pas si elle comprenait ce dont je parlais, sur les conséquences sur toute ma vie. Elle disait juste « oui » pour signifier qu’elle entendait. Et moi j’y revenais, je devais la lasser, mais moi j’avais besoin de le dire, le répéter. Moi non plus je ne comprenais pas encore tout à fait la répercussion que ce traumatisme avait eu sur toute ma vie.

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