Il rentra à Paris quelques semaines après moi : son contrat se terminait fin septembre. Moi j’avais repris mon emploi rue du Rocher.
Jean-Jacques Porchez me demande en mariage
À son retour en France il vint me chercher à mon travail et nous commençâmes à nous fréquenter.
Très vite il me demanda en mariage.
Je n’en pensais pas grand chose, sinon qu’il était le premier à me faire une telle demande.
J’étais tout à fait incertaine, au prise avec la pression familiale, ne ressentant rien d’autre que de la sympathie pour lui. J’ignorais ce qu’était le sentiment d’amour ne l’ayant que présumé à l’occasion de ma relation avec Jacques que j’avais clos inconsidérément en prise encore avec le système de pensée familiale de la virginité pour une fille.
Mon mariage était pour ainsi dire obligatoire !
Le mariage était ce que mes parents m’incitaient à convoiter le plus vite possible. Ils m’avaient fait suivre une année de sténo dactylo pour attendre le mari. Je travaillais en attendant le mari. Aucun ne s’était présenté. Et moi je n’y pensais jamais, vivant au jour le jour, essayant vaille que vaille de diverger dans mes actes de la pression familiale.
La famille de Jean-Jacques Porchez
Je fis la connaissance de ses parents pour lesquels j’eus tout de suite une attirance, si différents de ma famille dans leur rapport à l’autre, tant leur fils que moi. Je ne sentis aucune pression d’aucune sorte. Du moment qu’on resta honnête on se sentait libre, vite accueilli dans cette petite communauté. Cependant en tant que fils unique, entouré d’une mère et d’une grand-mère, du moment qu’il avait choisi de me fréquenter, cela ne pouvait qu’être « bon » pour tous !
- Pas d’homme,
- mais une grand-mère et
- une mère,
- son père était mort durant son adolescence.
Ils habitaient avenue de Ségur dans le 7ème arrondissement de Paris, au 1er étage d’un bel immeuble.
L’appartement était vaste, distribué à partir de l’entrée : deux grandes pièces en façade, salle à manger et salon, plus une troisième la chambre de Jean-Jacques.
- Est-ce à ce moment qu’il me montra fièrement sa collection de livres de Casanova qu’il se flatta avoir lu ?
- Sa collection des plus de 45 tomes des œuvres de Lénine viendrait s’y ajouter plus tard, Marx n’étant jugé que secondaire puisqu’il n’en acheta jamais les écrits.
Un grand couloir longeait sur la gauche la cuisine et la salle de bains, pour mener sur la droite à la chambre de sa mère, et au fond celle de sa grand-mère. Sa mère travaillait en face au ministère du travail en tant que chef de service. Elle était donc le soutien financier de la famille, mais le chef de famille était la grand-mère. J’aurai bien l’occasion au fil des années qui allaient suivre de la connaitre.
Je crois que le mariage va me libérer de mes parents
Ne me voyant pas d’autre avenir que celui de me marier, pensant qu’enfin je serai ainsi libérée de la surveillance de mes parents, j’acceptai sa demande. Il se révéla que c’était un quiproquo : j’étais bloquée par mes parents pour tout avenir en célibataire.
Personne, sinon mes lectures, aurait pu me faire envisager un autre avenir que mariée, le célibat était inenvisageable.
- Je ne me voyais ni rester vivre chez mes parents,
- ni prendre une chambre dans Paris. Les seules chambres de célibataire que je connaissais étaient dans les combles, minuscules, sans chauffage, sans eau courante, le WC et l’eau sur le palier du couloir commun à toutes ces chambres.
Je n’ai eu ni le courage de rester chez mes parents où j’aurais eu tout le confort sans aucune liberté concernant ma vie sentimentale, comme je venais de l’expérimenter, ni de m’aventurer à me louer une chambre, à vrai dire m’auraient-ils laissée libre de le faire ? Il m’aurait fallu une force que je n’avais pas encore acquise.